le «salaire décent» en question dans les entreprises
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Au Canada, une initiative commence à remporter un certain succès. Des entreprises ont décidé de troquer le salaire minimum pour un salaire décent ou un salaire viable. C’est l’ONG Living Wage Canada qui a lancé ce projet. En anglais, on appelle cela le « living wage ».
Avec notre correspondant à Montréal, Arthur Thibaudier
Le salaire viable, ou salaire décent, qu’a défini le Living Wage Network, est un salaire à l’heure qui permet à quelqu’un de couvrir ses dépenses de base, la nourriture, les vêtements, le transport et le loyer et aussi de participer à la vie économique de sa ville, avec quelques loisirs.
Ce salaire décent est toujours calculé de la même façon, c’est la moyenne de ce dont a besoin une famille avec deux enfants, une mère monoparentale, où un adulte seul sans enfant. Mais ce qui est intéressant est qu’il varie selon le coût de la vie dans les villes. À Ottawa, la capitale, le salaire minimum légal est à 15,50 dollars canadiens de l’heure, mais le salaire décent fixé par le Living Wage Network est lui à 18,60 dollars.
À Toronto, une ville où se loger coûte très cher – un appartement avec deux chambres est autour de 1 300 euros par mois- pour avoir le label salaire décent, une entreprise doit payer ses employés 22,08 dollars de l’heure.
Pénurie de personnel
Il y a une grosse pénurie de personnel au Canada. Comme il y a plus d’un million d’emplois vacants sur plus de 20 millions de population active, tout ce qui peut attirer le candidat va compter. Avec le logo du label « salaire décent » clairement affiché sur la porte d’une entreprise, la personne qui cherche un emploi a déjà de l’information avant même d’avoir passé l’entretien d’embauche.
Et ensuite, l’un des arguments de l’organisation est que payer un salaire décent aux employés, c’est un investissement important pour la prospérité à long terme de l’économie, parce que ça crée des gens dévoués, compétents et en bonne santé. Donc, ça permet de les garder plus facilement les employés.
Une compagnie théâtrale, qui est allée chercher la certification salaire décent, estime que ça a rassuré ses employés, pendant la pandémie, de gagner davantage parce que le secteur était dans l’incertitude totale. C’était la garantie de ne pas être dans la pauvreté à cette période-là.
Les consommateurs payent ?
Cela fait des dépenses en plus pour l’entreprise. Mais qui paie la facture derrière ? Radio-Canada s’est penchée là-dessus à Toronto en allant voir plusieurs magasins. Un salon de coiffure a tout simplement épongé la hausse, sans augmenter les prix pour les clients, alors qu’un restaurant, lui, a fait grimper les prix de son menu. Ce sont les clients, dans ce cas-là, qui doivent absorber la hausse salariale.
L’une des critiques faites aux partisans du label salaire décent est que toutes les entreprises ne peuvent pas se le permettre. Il y en a où c’est difficile de ne pas faire payer la facture au consommateur. Donc ce que paie le client, dans ces cas-là, ça peut être la variable d’ajustement.
D’autant plus que tous les ans ou tous les six mois, le salaire décent est recalculé par Le Living Wage Network, souvent à la hausse. Les entreprises ont six mois pour s’adapter. Mais visiblement, l’idée de cette certification plaît. D’après des chiffres de Radio-Canada, il y a deux ans et demi, il y avait 167 entreprises participantes en Ontario et maintenant, il y en a 500.
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