La taxe sur les super profits s’impose en Europe, sauf en France
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Pour financer le bouclier énergétique, la plupart des grands pays européens ont adopté une taxe sur les super profits. En France cette option fait toujours débat. La gauche et une partie du gouvernement y sont favorables mais le patronat s’y oppose. La mise en place de ce nouvel impôt est-il aujourd’hui une nécessité?
L’Allemagne est le nouveau pays converti à cet impôt exceptionnel. Le chancelier Olaf Scholz l’a annoncé hier dimanche avec les nouvelles mesures de soutien aux particuliers et aux entreprises pour passer l’hiver sans le gaz russe. Berlin emboîte le pas à Londres, Rome, Madrid ou encore Bucarest et Athènes.
Partout le raisonnement est le même : il faut financer ce « quoiqu’il en coûte énergétique ». Et plutôt que d’alourdir la dette publique, il paraît plus raisonnable de ponctionner les super profits. Une décision populaire, voire populiste disent ses détracteurs. Ils dénoncent le flou qui entoure la définition des super profits. Pourtant on comprend intuitivement que ce sont des profits anormalement élevés dégagés à un instant T par une entreprise. Mais c’est vrai qu’il n’y a pas de seuil établi à partir duquel on considère qu’une entreprise réalise un super profit.
Les effets d’aubaine
En revanche il y a un faisceau d’événements considérés comme générateur de super profit, souvent des facteurs externes.
Quand les gains d’une entreprise bondissent d’une façon exponentielle sans qu’elle y soit pour quelque chose, sans qu’elle ait investi, ou déployé une stratégie particulière, on peut parler de super profits. Quand il fait très chaud par exemple, la consommation de bière augmente sensiblement et les revenus des brasseurs s’envolent. Mais en soi le produit est toujours le même qu’en hiver. C’est un effet d’aubaine. Les brasseurs dégagent alors un super profit. Avec l’envolée du pétrole, et surtout du gaz et de l’électricité, ce sont les énergéticiens qui sont à la fête en ce moment. Les profits de TotalEnergies ont quasiment doublé au second trimestre. Ceux de l’Allemand Wintershall ont triplé.
Pas d’effet négatif sur les entreprises
Taxer ces super bénéfices à hauteur de 25% comme au Royaume-Uni peut-il avoir un impact négatif sur l’entreprise ? C’est l’argument massue des chefs d’entreprise, des économistes libéraux, et aussi du ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Un argument démenti par la recherche économique. Quand François Hollande a triplé la taxe sur les dividendes, leurs actionnaires ont été moins bien rémunérés mais leurs investissements ont augmenté, il n’y a donc pas eu d’effets négatifs, bien au contraire, constatent trois économistes dans un article publié cet été. Esther Duflo, la prix Nobel d’économie est favorable à cet impôt. Le FMI aussi. Même la très libérale Commission européenne recommande aux gouvernements d’adopter cette taxe à titre exceptionnel.
Ce nouvel impôt suffit à financer les dépenses en faveur du bouclier énergétique ?
Les Britanniques escomptent des recettes de 5 milliards d’euros, l’Italie le double avec un taux identique. Cela dépend bien sûr du nombre d’entreprises concernées. En Allemagne par exemple les producteurs d’électricité solaire sont concernés alors qu’ailleurs ce sont surtout les producteurs d’hydrocarbure qui sont mis à contribution. La taxe ne couvrira qu’une partie du bouclier énergétique, car il se chiffre lui en dizaines de milliards d’euros, mais elle allégera la note ou permettra de dégager plus de moyens.
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Une option qui paraît peu probable car le prix du baril est en baisse depuis trois mois. À cause de la récession qui menace en Occident. Il sera bien sûr également question du plafond décrété par le G7 Finances pour le prix du pétrole russe. Il s’appliquera à partir du mois de décembre. En même temps que l’embargo européen. En Europe on s’attend aujourd’hui à une nouvelle envolée des marchés du gaz et de l’électricité.