Jeremy Rifkin: «l’ère du progrès doit être remplacée par l’ère de la résilience»



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Aujourd’hui l’économie, le portrait, avec Jeremy Rifkin, économiste et sociologue américain. Il vient de publier un nouvel essai l’Age de la Résilience – La Terre se réensauvage, il faut nous réimaginer aux éditions Les liens qui libèrent. Il accuse nos modes de vie basés sur le progrès et l’efficience de détruire la planète. Ariane Gaffuri s’est entretenue avec lui. 

« Quand mon père est né, c’était en 1908, 85% de la terre était encore sauvage. Elle ne l’est plus que de 25% aujourd’hui. Le reste est occupé par l’homme. Et dans 20, 30 ou 40 ans, ce sera pire. L’efficience doit donc être repensée. Et nous commençons un peu à passer à l’adaptabilité et la résilience. Autrement dit, à apprendre à nous adapter à la nature, au lieu de faire en sorte que la nature s’adapte à nous. »

Lutter contre le changement climatique est un combat de longue date pour Jeremy Rifkin, 76 ans, au travers de nombreux livres, de conférences et d’actions très suivies à travers le monde. Ce spécialiste de la prospective est issu d’une famille juive russe immigrée au Texas, mais il grandit dans le sud-ouest de Chicago.

« J’ai grandi dans un quartier ouvrier. Les hommes de notre quartier travaillaient dans les parcs à bestiaux, les aciéries. C’étaient des gens attachés aux syndicats. Je suis allé dans un lycée public. Ensuite, j’ai eu la chance d’aller à l’université Ben Franklin en Pennsylvanie. Benjamin Franklin a fondé notre école, la plus ancienne université d’Amérique. Ensuite, je suis allé à l’école Wharton qui est la première école de commerce au monde. Ensuite, j’ai été pris dans le mouvement des droits civiques et contre la guerre du Vietnam. »

Jeremy Rifkin étude aussi le droit international et la diplomatie, sans cesser de militer. 

« J’étais un autodidacte d’une certaine manière après mes études… À cette époque, la plupart d’entre nous étaient militants, nous n’avions pas de carrière. J’ai toutefois enseigné la gestion à la Wharton School plus tard pendant 15 ans. Nous faisons venir des chefs d’entreprises du monde entier. Et j’ai aimé parler de l’économie certes mais aussi de sa relation avec d’autres disciplines, comme la sociologie, les sciences… Traverser les frontières. Si j’étais devenu universitaire, j’aurais été coincé dans un seul domaine et j’en saurais de moins en moins dans cette discipline. »

En 1973, Jeremy Rifkin organise une manifestation contre les compagnies pétrolières à Boston, en réaction à la hausse des prix des hydrocarbures due à l’embargo sur le pétrole de la part de l’Opep. C’est cet événement qui a déclenché son engagement indéfectible en faveur du climat.

« C’était la toute première mobilisation mondiale contre les compagnies pétrolières et j’en suis très fier. Nous ne savions pas si quelqu’un viendrait, d’autant que le jour de la manifestation, il y a eu une tempête de neige terrible et je ne voyais pas un chat dans la rue, près du lieu du rassemblement. Mais au coin de la rue, j’ai vu des dizaines de milliers de personnes, des familles entières, des jeunes, des vieux, 20 000 en tout. Ils avaient des pancartes à la main. Ils sont venus nous rejoindre pour s’élever contre les compagnies pétrolières mondiales. Ce fut une expérience incroyable. »

Une expérience incroyable qui donnera naissance quelques années plus tard, à la Fondation pour les tendances économiques, qui étudie les problèmes environnementaux, sociaux, économiques et éthiques.

En 1988, Jeremy Rifkin rassemble les scientifiques du climat et les militants écologistes de 35 pays à Washington pour une première réunion du mondiale sur les effets de serre. Souvent présenté comme le principal théoricien de la Troisième révolution industrielle, marquée par le développement des technologies de l’information et de la communication, c’est aussi un des architectes du Plan vert de l’Union européenne. Même son temps de libre, il le consacre à la nature.

« Ma femme est fortement impliquée dans les droits des animaux en tant que journaliste et militante. Nous avons créé une fondation il y a de nombreuses années et nous avons un endroit aux États-Unis que nous avons mis en servitude de conservation des terres, afin que la faune puisse s’y épanouir. Vous ne pouvez rien y développer. Nous avons des renards, des ours, de très beaux oiseaux. Ma femme s’en occupe pour l’essentiel, et nous aimons être au sein de cette nature, et apporter notre toute petite part pour s’assurer que cette petite zone là reste sauvage. »

Parmi les derniers projets de ce chercheur hétéroclite, faire avancer sur la scène politique la cause de l’hydrogène provenant de sources renouvelables.



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