Comment catalyser les ressources du secteur privé vers la finance verte en Afrique?
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L’Africa Investment Forum qui s’est tenu du 2 au 4 novembre à Abidjan, sous l’égide de la Banque africaine de développement, était l’occasion d’un premier tour de chauffe sur la question en prévision de la COP27. La BAD s’apprête à y lancer sa propre initiative pour les banques vertes en Afrique : l’initiative AG3F, pour African Green Finance Facility Fund.
C’est un paradoxe qui a été répété, martelé même, à chacune des conférences du forum. Les pays africains sont à la fois les moins responsables des émissions de gaz à effet de serre, les plus exposés aux dérèglements climatiques, et ceux qui bénéficient le moins des financements verts : à peine 3% du total mondial. Pour y remédier, la Banque africaine de Développement (BAD) s’apprête à lancer à la COP sa propre initiative pour les banques vertes en Afrique, l’African Green Finance Facility Fund, l’AG3F. Laquelle devrait, à terme, être dotée d’un fonds d’un milliard et demi de dollars.
L’objectif, pour Kevin Kariuki, vice-président chargé de la croissance verte à la BAD, est de favoriser la création d’un écosystème d’institutions financières écoresponsables sur le continent. « Nous devons trouver des moyens de diversifier les sources de financement du climat. Aujourd’hui en Afrique, 80% des sources de financement du climat proviennent d’entités publiques : le Fonds vert pour le Climat (Green Climate Change), le Fonds pour l’environnement mondial (Global Environment Facility), et les contributions de pays donateurs. Il y a une immense opportunité d’accroître le montant du financement climatique mobilisé par le biais du secteur privé. Et l’un des domaines de mobilisation du financement climatique par le secteur privé est le secteur bancaire, d’où le lancement de cette initiative. »
L’enjeu est donc désormais d’attirer les investisseurs privés, plutôt frileux sur le sujet. La Trade and Development Bank (TDB) est l’un des pionniers du secteur et fera partie de l’initiative AG3F de la BAD. Son directeur général, Admassu Tadesse, se dit confiant : la prise de conscience de l’urgence climatique est aujourd’hui suffisante chez les acteurs financiers, promet-il, pour créer un climat propice aux investissements durables. « Il y a eu une vraie évolution ces dernières années, les obligations durables pèsent aujourd’hui plus de 1 000 milliards de dollars. Nous avons nous-mêmes investi [à TDB] dans divers placements respectueux du climat, et lorsqu’on décortique ces problématiques, on se rend compte qu’il y a énormément à faire. Tout le monde peut désormais facilement voir que c’est faisable. C’est pratique. Ce n’est pas une chimère. »
Les chantres de la finance verte affirment qu’elle permet, elle aussi, d’offrir le retour sur investissement attendu par les acteurs privés. « Pour les investisseurs, la question est : “Est-ce un projet bankable ?” Pour les investisseurs, la question est : “Est-ce que j’obtiens un retour ajusté au risque ?” Et je pense que dans les deux cas, Africa50 a pu faire l’expérience de nombreux projets bancables et rentables sur le continent. Nous avons été convaincus, et les investisseurs privés seront convaincus à leur tour », avance Tshepedi Moremong, directrice des opérations de la plateforme d’investissements Africa50. Pour l’heure, les besoins sont énormes : selon la BAD, les économies africaines auront besoin de 2 800 milliards de dollars d’investissements verts d’ici 2030.