Argentine: la carte «Barrio Unido», une solution pour faire face à l’inflation
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Plus de 6 % en septembre, 66 % depuis janvier… L’inflation n’en finit plus de battre des records en Argentine. Elle devrait même dépasser la barre symbolique des 100 % cette année. Face à l’incapacité du gouvernement à enrayer la flambée des prix, de plus en plus d’Argentins s’organisent à l’échelle locale pour essayer de boucler les fins de mois.
De notre correspondant à Buenos Aires,
Pour Alfredo Castro, c’est devenu une habitude : au moment de payer ses courses, comme ici à la boucherie, il dégaine sa carte « Barrio Unido », « quartier uni ». « Avec la carte, on a des réductions un peu partout : quincaillerie, pharmacie, primeur, boucher… C’est un petit coup de pouce pour le porte-monnaie »
Ce petit sésame plastifié bleu et blanc offre des réductions de 10, 20 ou 30% dans quelque 200 commerces locaux. Des petites économies qui, mises bout à bout, font une grande différence, explique Victor Rodriguez en remplissant son cabas. « Ça aide énormément ! Là, je viens d’économiser 1 300 pesos, environ 5 euros, en achetant de la viande, et je peux faire la même chose avec les médicaments, qui sont aussi très chers ces derniers temps »
De l’autre côté du comptoir, Leonardo Santoro, le boucher, découpe un kilo d’osso bucco. Il est membre de « Barrio Unido », l’association de quartier à l’origine de la création de cette carte début juillet. « Quand les prix ont commencé à flamber, commerçant et habitants du quartier ont commencé à comprendre que si on ne se serrait pas les coudes, on allait tous se retrouver très vulnérables. »
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Cercle vertueux
Rien qu’en juillet, les prix ont bondi de 7,5 %. Autrement dit, le coût de la vie a plus augmenté en un mois en Argentine qu’en un an en France, par exemple. C’est à ce moment-là que Leonardo Santoro a eu l’idée de cette initiative destinée à limiter l’envolée des prix tout en faisant circuler l’argent dans le quartier. « Si tous les commerçants du quartier travaillent plus, ils embauchent plus, et cela génère plus d’emploi. C’est un cercle vertueux. »
Et la carte, qui est distribuée gratuitement, a rapidement trouvé son public. En moins de quatre mois, elle a déjà séduit plus de 4 000 personnes, et elle continue chaque jour de faire de nouveaux adeptes. C’est le cas de Brenda qui, du haut de ses 25 ans, doit subvenir seule aux besoins de ses quatre frères et sœurs. « Ça me donne la possibilité d’acheter certaines choses que je ne pouvais pas me permettre avant. Avec les prix qui augmentent tout le temps, j’achète d’abord l’essentiel. »
« Avec les réductions, ils peuvent tout acheter »
Privilégier et même parfois sacrifier l’essentiel, ce que la carte « Barrio Unido » a vocation à éviter, explique Yanina Mareco. Elle travaille dans la première pharmacie qui a adhéré à l’initiative. « Quand il y avait trois médicaments sur la prescription, les gens essayaient d’en acheter un seul, ils me demandaient : “lequel est le plus important ?”. Maintenant, avec les réductions de la carte, ils peuvent tout acheter. »
Alors que la pauvreté diminue ces derniers mois en Argentine, l’indigence, elle, est en augmentation. Cela signifie que les gens dont les revenus ne couvrent pas les besoins alimentaires de base sont de plus en plus nombreux, car les prix des aliments augmentent encore plus vite que l’inflation générale. D’où le succès de la carte Barrio Unido, qui a d’ailleurs commencé à faire des émules dans d’autres villes du pays.