Arabie saoudite: pétrole cher et ski dans le désert



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Violemment décriée il y a quatre ans après l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi, l’Arabie saoudite est aujourd’hui plus que jamais courtisée. La manne qu’elle tire de son pétrole lui autorise tous les excès. Le dernier en date : organiser les Jeux asiatiques d’hiver de 2029. 

Vingt-quatre milliards de dollars d’excédent budgétaire cette année, 26 milliards et demi prévus en 2023, l’économie saoudienne se porte plutôt très bien en ces temps de crise. L’agence Standard & Poors a récemment évalué à 7,5% la croissance du PIB en 2022, à un moment où la récession s’installe un peu partout dans le monde. Et l’inflation qui pèse sur de nombreuses économies dépassera à peine les 2,5% cette année, selon le ministère saoudien des Finances. 

Une performance notable quand on sait que le royaume revient de loin. La pandémie avait asséché ses deux principales sources de revenus, à savoir le pétrole et le tourisme religieux. Aujourd’hui, cette période n’est plus qu’un lointain souvenir. Le Hajj et les Omra, le grand et les petits pèlerinages font le plein et les cours du pétrole dépasse les 90 dollars le baril, là où ils étaient passés sous les 10 dollars pendant la pandémie. 

L’actuelle crise énergétique devrait profiter encore plus au pays

La décision prise le 5 octobre par l’Opep+, dont l’Arabie saoudite est l’un des membres les plus influents, de réduire drastiquement ses quotas de production de pétrole – une première depuis le début de la pandémie – va probablement doper les cours, pour le plus grand bénéfice des pays producteurs de pétrole et donc des finances saoudiennes. 

Reflet de cette opulence, le Fonds d’investissement public – pas moins de 606 milliards de dollars d’actifs en juin – que les autorités saoudiennes ambitionnent de porter à 1 000 milliards d’ici trois ans, soit l’équivalent de ce que pèse actuellement le fonds souverain norvégien, le plus gros au monde. À la tête de ce fonds, l’homme fort du pays, le prince héritier Mohammed ben Salman qui en a fait un instrument clé de la modernisation et de la diversification de l’économie saoudienne, mais surtout de sa réussite personnelle.

Les projets les plus fous peuvent voir le jour

Comme ces jeux asiatiques d’hiver que l’Arabie saoudite s’apprête à organiser en plein désert. Abandonnés en 2017 car jugés trop coûteux et sans intérêt, ils pourraient se tenir en 2029 à Neom, un autre projet fou, une mégalopole futuriste, inspiré du film de super-héros Les gardiens de la galaxie, dont Mohammed ben Salman est un grand fan. Neom, qu’il veut ériger dans le nord-ouest du pays, n’est toujours pas sortie de terre. Mais 500 milliards de dollars sont déjà mobilisés pour sa construction, auxquels il faudra désormais ajouter le coût d’une station avec des pistes de ski, un lac artificiel d’eau douce, des chalets et des hôtels de luxe. Car les jeux d’hiver, ce sont 28 épreuves sur neige et 19 sur glace, que l’Arabie saoudite veut organiser dans une région où il ne pleut que très rarement, sans même parler de neige… 

Mais le paradoxe de tout ça c’est que Neom est vendue comme une ville zéro-carbone, respectueuse de l’environnement alors que le royaume reste l’un des premiers producteurs et exportateurs de pétrole de la planète. 

Cette pluie de pétrodollars a tout de même permis d’engager une diversification de l’économie saoudienne

La fameuse vision 2030 portée par Mohammed ben Salman avec des secteurs prioritaires comme les infrastructures, l’aérospatiale, la voiture électrique, le jeu-vidéo ou les énergies renouvelables. Le fonds souverain saoudien vient, pas plus tard que la semaine dernière, de mandater plusieurs grandes banques pour l’émission d’une obligation verte destinée à financer des projets environnementaux. Il compte consacrer plus de 10 milliards de dollars d’ici 2026 aux énergies renouvelables, au transport décarboné ou à la gestion durable de la fourniture d’eau. 

Mais parallèlement, le royaume, l’un des premiers producteurs de pétrole au monde, vient de lancer un grand plan d’investissements dans les infrastructures de production et de transport d’hydrocarbures, tout en se fixant pour objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2060. Le pays, on le voit, n’en est pas une contradiction près. Depuis l’annonce de l’Opep+, le cours du baril de brut s’est renchéri… la manne des pétrodollars n’est pas près de se tarir.



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